משנה: יֵשׁ מְבִיאִין בִּיכּוּרִין וְקוֹרִין. מְבִיאִין וְלֹא קוֹרִין. וְיֵשׁ שֶׁאֵינָן מְבִיאִין. אֵלּוּ שֶׁאֵינָן מְבִיאִין הַנּוֹטֵעַ בְּתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ בְּתוֹךְ שֶׁל יָחִיד אוֹ בְּתוֹךְ שֶׁלְרַבִּים. וְכֵן הַמַּבְרִיךְ מִתּוֹךְ שֶׁלְיָחִיד אוֹ מִתּוֹךְ שֶׁלְרַבִּים לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ. הַנּוֹטֵעַ בְּתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ בְּתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְדֶרֶךְ הַיָּחִיד וְדֶרֶךְ הָרַבִּים בָּאֶמְצַע הֲרֵי זֶה אֵינוֹ מֵבִיא. רִבִּי יְהוּדָה אוֹמֵר מֵבִיא. מֵאֵי זֶה טַעַם אֵינוֹ מֵבִיא. מִשּׁוּם שֶׁנֶּאֱמַר רֶאשִׁית בִּכּוּרֵי אַדְמָֽתְךָ תָבִיא עַד שֶׁיְּהוּ כָל־הַגִּידּוּלִים מֵאַדְמָֽתְךָ. Les uns, en apportant les prémices, lisent le passage biblique qui s’y rapporte (Dt 26, 3-10); d’autre les apportent, sans rien réciter; enfin il en est qui ne les apportent même pas. Voici quels sont ces derniers: Celui qui plante de la vigne dans son terrain et la provigne dans le chemin d’un particulier ou sur la voie publique; de même, celui qui détournant une branche d’un cep situé chez un particulier, ou sur la voie publique, la provigne sur son terrain; ou encore, celui qui ayant planté la vigne sur son propre terrain la provigne sur un autre terrain de sa propriété, séparé du premier par un chemin particulier ou public: en tous ces cas, on n’offre pas les prémices1N'étant pas néses de son bien seul.. Selon R. Juda, il faut les offrir même en ces cas. Pour quel motif n’offre-t-on pas les prémices en ces cas ? Parce qu’il est écrit (Ex 23, 19) : les prémices des premiers fruits de ton sol et (Ex 34, 26); c.-à-d. il faut que la croissance entière ait eu lieu sur son sol. Pour la même raison, les fermiers qui prennent le champ à raison d’une part du revenu, ou ceux qui se chargent de la cultiver à gage fixe, ou celui qui s’en est emparé sous la menace de mort, ou le brigand, n‘en offrent pas les prémices, conformément au verset précité.
הלכה: יֵשׁ מְבִיאִין בִּכּוּרִין וְקוֹרִין כול׳. הַנּוֹטֵעַ בְּתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ בְּתוֹךְ שֶׁלְיָחִיד אוֹ לְתוֹךְ שֶׁלְרַבִּים אֲפִילוּ מִן הַזְּקֵינָה אֵינוֹ מֵבִיא. הַמַּבְרִיךְ מִתּוֹךְ שֶׁלְיָחִיד אוֹ מִתּוֹךְ שֶׁלְרַבִּים לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ אֲפִילוּ מִן הַיַּלְדָּה אֵינוֹ מֵבִיא. הָדָא אָֽמְרָה כְּשֵׁם שֶׁיַּלְדָּה חָיָה מִן הַזְּקֵינָה כָּךְ הַזְּקֵינָה חָיָה מִן הַיַּלְדָּה. Celui qui plante dans son propre terrain et provigne dans le chemin d’un particulier, ou sur la voie publique, fut-ce lié à une ancienne souche qui est dans son propre terrain, n’apporte pas de prémices. Celui qui détourne une branche d’un cep situé chez un particulier, ou sur la voie publique, fut-ce d’une jeune branche, n’apportera pas les prémices. Cette similitude de règle prouve qu’une ancienne souche se nourrit de la jeune, comme aussi l’inverse a lieu.
אָמַר רִבִּי יוֹחָנָן כּוּלְּהֹן מִשּׁוּם תּוֹרַת הַגּוֹזְלָן יָֽרְדוּ לָהֶן. אָמַר רִבִּי יוֹסֵי מַתְנִיתָא אָֽמְרָה כֵן. מֵאֵי זֶה טַעַם אֵינוּ מֵבִיא מִשּׁוּם שֶׁנֶּאֱמַר רֵאשִׁית בִּכּוּרֵי אַדְמָֽתְךָ. R. Yohanan dit: les divers cas pour lesquels la Mishna dispense de l’apport en sont exclus à titre de vol (tirant leur sève du voisin sans sa permission). En effet, dit R. Yossé, la Mishna le prouve bien en disant (§ 2): “On ne les offre pas, parce qu’il est écrit: de ton sol, etc.”. (c.-à-d. qu’en dehors du sol, c’est un vol).
תַּנֵּי אִם הִבְרִיךְ בִּרְשׁוּת מֵבִיא וְקוֹרֵא. רִבִּי יוֹסֵי בְשֵׁם רִבִּי אִימִּי וְהוּא שֶׁנָּתַן לוֹ רְשׁוּת לְעוֹלָם. הָא לְשָׁעָה לֹא. רִבִּי יוֹנָה בְשֵׁם רִבִּי אִימִּי אֲפִילוּ לְשָׁעָה. חֵיילֵיהּ דְּרִבִּי יוֹנָה מִן הָדָא. הָיָה חוֹפֵר בּוֹר וְשִׁיחַ וּמְעָרָה קוֹצֵץ וְיוֹרֵד וְהָעֵצִים שֶּׁלּוֹ. וְעֵצִים לֹא לְשָׁעָה הֵן. מַה עָבַד לָהּ רִבִּי יוֹסֵי. שָׁרָשִׁים שֶׁדַּרְכָּן לְהַחֲלִיף לְעוֹלָם. מִכֵּיוָן שֶׁדַּרְכָּן לְהַחֲלִיף לְעוֹלָם הֵן. אָמַר רִבִּי מָנָה מִילְתֵיהּ דְּרִבִּי יוֹחָנָן מְסַייֵעַ לְאַבָּא. דְּאָמַר רִבִּי יוֹחָנָן כּוּלְּהֹן מִשּׁוּם תּוֹרַת הַגּוֹזְלָן יָֽרְדוּ לָהֶן. וְכָאן מִכֵּיוָן שֶׁנָּתַן לוֹ רְשׁוּת לְהַבְרִיךְ אֲפִילוּ לְשָׁעָה אֵין זֶה גּוֹזְלָן. Aussi a-t-on dit: si l’on a provigné avec l’autorisation du voisin, on offrira les prémices en faisant la lecture officielle. R. Yossé au nom de R. Imi y ajoute la condition que l’autorisation ait été donnée pour toujours (de sorte que ce soit son sol), mais non passagèrement. Selon R. Yona au nom de R. Imi, cette dernière clause peut suffire. A l’appui de l’avis de R. Yona, on peut citer ceci2Mishna, Baba Batra 2, 12.: “Lorsque quelqu’un dans son champ creuse la terre pour y faire un puits, un fossé, ou une caverne, il pourra (aussi profond qu’il creuse) couper les racines du voisin et garder ce bois pour lui”. Or, il s’agit là d’une autorisation momentanée. Que réplique à cela R. Yossé? Selon lui, les racines se renouvellent souvent; et comme il est toujours autorisé à les couper, elles sont considérées comme étant à lui. R. Mena dit: l’avis de R. Yohanan confirme celui d’Aba, car R. Yohanan dit: les divers cas pour lesquels la Mishna dispense d’offrir les prémices en sont exclus à titre de vol; or ici, dès que l’on est autorisé à provigner sur le terrain d’autrui, fut-ce un seul moment, on ne commet plus de vol (et l’offre aura lieu).
רִבִּי זְרִיקָן בָּעֵא קוֹמֵי רִבִּי זְעִירָה. מַתְנִיתָא דְּרִבִּי. דְּרִבִּי אָמַר שָׁרָשִׁין חָייִן זֶה מִזֶּה. אָמַר לֵיהּ דִּבְרִי הַכֹּל הִיא. הָכָא הַתּוֹרָה אָֽמְרָה רֵאשִׁית בִּכּוּרֵי אַדְמָֽתְךָ עַדּ שֶׁיְּהוּ כָל־הַגִּידּוּלִּים מֵאַדְמָֽתְךָ. R. Zerika remarqua en présence de Rabbi que notre Mishna doit émaner de Rabbi, qui dit plus haut3"Tr; (Orla 1, 8).": Les racines tirent leur suc l’une de l’autre. Non, dit R. Zeira, on peut l’expliquer conformément à tous: seulement ici4Même série, Baba Batra l. c. ( 13c). la Bible emploie l’expression “les prémices des 1er fruits de ton sol”, pour dire que tous les produits devront provenir de ton sol, et non d’autrui, même avec autorisation.
עַל דַּעְתֵּיהּ דְּרִבִּי יוּדָה מַה בֵין הַנּוֹטֵעַ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ לְתוֹךְ שֶׁל יָחִיד. מַה בֵין הַנּוֹטֵעַ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְדֶרֶךְ הַיָּחִיד בְּאֶמְצַע. רִבִּי אָחָא בְשֵׁם רִבִּי מִייָשָׁא. בְּשֶׁהִבְרִיכָהּ בִּדְלַעַת אוֹ בְסִילוֹן. אִי בְּשֶׁהִבְרִיכָהּ בִּדְלַעַת אוֹ בְסִילוֹן יָבִיא וְיִקְרָא. אֲפִילוּ כְרַבָּנִין יָבִיא וְיִקְרָא. אָמַר רִבִּי יוֹנָה צְרִיכָה לְרִבִּי יוּדָה. הַמּוֹכֵר שְׁבִיל לַחֲבֵירוֹ מְקוֹם דְּרִיסָה הוּא מָכַר אוֹ עַד הַתְּהוֹם מָכַר. אִין תֵּימַר מְקוֹם דְּרִיסָה מָכַר מֵבִיא וְקוֹרֵא. אִין תֵּימַר עַד הַתְּהוֹם מָכַר. לֹא יָבִיא כָל־עִיקָּר. מִסָּפֵק מֵבִיא וְאֵינוֹ קוֹרֵא. רַבָּנִין פְּשִׁיטָא לוֹן שֶׁמָּכַר עַד הַתְּהוֹם. מָה פְלִיגִין. בְּמוֹכֵר שְׁבִיל לַחֲבֵירוֹ. אֲבָל אִם מָכַר לוֹ שָׂדֶה וְשִׁייֵר לוֹ שְׁבִיל. כָּל־עַמָּא מוֹדֵיי שֶׁשִּׁייֵר לוֹ עַד הַתְּהוֹם. Selon R. Juda, quelle différence y a-t-il entre celui qui plante une vigne dans son terrain, puis la provigne dans le chemin d’un particulier, et celui qui après avoir planté dans son terrain provigne sur un autre terrain à lui, séparé du premier par un chemin particulier? (Pourquoi dit-il, au 2e cas, d’offrir les prémices, non au 1er)? Il s’agit, dit R. Aha au nom de R. Mesha, du cas où le provin a lieu à travers une courge, ou un tuyau (car il n’y a alors nul contact avec le sol étranger). Mais s’il en est ainsi, pourquoi dire que selon R. Juda seul il faut en offrir les prémices et l’accompagner de la lecture officielle? N’est-ce pas aussi selon les Rabbins? Voici, répond R. Yona, à quel cas s’applique l’avis de R. Juda: lorsqu’on cède un sentier à son prochain, on ne sait si on lui vend la place où l’on marche, ou si l’on vend le sol jusqu’à son extrême profondeur. Or, si l’on a vendu la place où l’on marche, il faut offrir les prémices et lire la récitation officielle (le sol inférieur restant au propriétaire); au cas contraire, s’il est admis qu’en ce cas on vend tout le sol jusqu’au dernier fond, la séparation par un sol étranger est réelle, et l’on n’en offrira pas de prémices. En raison du doute, on les offrira, mais sans rien lire. Il va sans dire que, selon les autres sages qui disent de ne pas offrir les prémices, il est admis que le sol est vendu jusqu’au fond, et ils sont en désaccord avec R. Juda en cas de cession d’un sentier à autrui. Mais s’il s’agissait de la vente d’un champ dont le maître a gardé un sentier (sous lequel passerait le provin), tous s’accorderaient à dire que le maître s’est réservé cette bande de terre jusqu’au fond.
עַל דַּעְתֵּיהּ דְּרִבִּי יוּדָה מַה בֵין הַנּוֹטֵעַ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ לְתוֹךְ שֶׁלְרַבִּים. מַה בֵין הַנּוֹטֵעַ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְהִבְרִיךְ לְתוֹךְ שֶׁלּוֹ וְדֶרֶךְ הָרַבִּים בְּאֶמְצַע. אָמַר רִבִּי אִימִּי אַתְייָא דְּרִבִּי יוּדָה כְרִבִּי לִיעֶזֶר. דְּתַנִּינָן תַּמָּן אֵין עוֹשִׂין חָלָל תַּחַת רְשׁוּת הָרַבִּים בּוֹרוֹת שִׁיחִין וּמְעָרוֹת. רִבִּי לִיעֶזֶר מַתִּיר כְּדֵי שֶׁתְּהֵא עֲגָלָה מְהַלֶּכֶת וּטְעוּנָה אֲבָנִים. כְּמָה דְרִבִּי לִיעֶזֶר אָמַר תַּמָּן תַּחַת רְשׁוּת הָרַבִּים שֶׁלּוֹ. כָּךְ רִבִּי יוּדָה אָמַר הָכָא תַּחַת רְשׁוּת הָרַבִּים שֶׁלּוֹ. רִבִּי שְׁמוּאֵל בַּר רַב יִצְחָק בָּעֵי. אִין כְּרִבִּי לִיעֶזֶר יָבִיא וְיִקְרָא. אָמַר רִבִּי יוֹסֵי מִיסְבַּר סָבַר רִבִּי שְׁמוּאֵל בַּר רַב יִצְחָק שֶׁרִבִּי לִיעֶזֶר מַתִּיר לַעֲשׂוֹת כֵּן וְהֵן שֶׁלּוֹ לְעוֹלָם. אֶלָּא רִבִּי לִיעֶזֶר מַתִּיר לַעֲשׂוֹת כֵּן וְכָל־הַקּוֹדֵם בָּהֶן זָכָה. Selon l’avis de R. Juda, quelle différence y a-t-il entre celui qui plante une vigne dans son terrain puis la provigne dans le chemin public, et celui qui après avoir planté provigne sur un sol séparé du sien par une voie publique? R. Imi répond: cet avis de R. Juda est conforme à ce que R. Eliézer dit ailleurs5Ibid., 3, 8., qu’il est interdit de creuser des cavités sous la voie publique, pour établir un puits, un fossé ou une caverne; R. Eliézer le permet, à la condition que la voie soit assez ferme pour laisser passer au-dessus un chariot chargé de pierres. Or, de même que R. Eliézer dit en ce cas que l’espace inférieur de la voie publique appartient au riverain, de même R. Juda le dit ici (et par conséquent, le sol étant au maître, il offrira les prémices pour tout). Mais, objecta R. Samuel bar R. Isaac, s’il est admis selon R. Eliézer que tout le fond est au même propriétaire, l’offrande devrait être officielle et accompagnée de la lecture? R. Yossé répond: R. Samuel bar R. Isaac suppose que R. Eliézer permet d’agir ainsi et que les produits seront toujours à lui; en réalité, R. Eliézer permet bien d ‘agir ainsi, seulement les fruits seront au premier occupant.